Pierre à bassin n°4 (Montguerlhe)
Pierre à encoches (Mont Sainte Odile) Bassin + encoches (Mont Sainte Odile) Pierres à encoches n°11 (bassin + encoches) - Montguerlhe Pierres à encoches n°11 (bassin + encoches) - Montguerlhe Pierres à encoches n°11 (bassin + encoches) - Montguerlhe Détails
du mur de Montguerlhe : appareil irrégulier en granite. |
Les carrières Durant nos nombreuses recherches sur le château de Montguerlhe, nous avons découvert quelques pierres insolites : des pierres à bassin et à encoches (une douzaine de pierres numérotées de 1 à 12). La tradition locale fait de ces rochers des pierres cultuelles celtiques soit disant "pierres à sacrifice" ou "pierres de guérison".
Notre côté cartésien nous a rapidement fait abandonner cette voie pour essayer de percer le mystère de ces pierres. L'avis des géologues plaide plutôt en faveur d'un phénomène naturel du à l'érosion du granite (bleu / gris) pendant la glaciation. La découverte de pierres à encoches ou à emboitures à proximité immédiate de ces pierres à bassin nous a rapidement orienté vers une autre solution.
Pierre à bassin n°8 (Montguerlhe)
Il existe en France, une multitude de pierres à bassin et à cupule. Leurs rôles et leurs origines demeurent encore un mystère car les études approfondies de ce phénomène sont rares. Mais souvent, elles semblent avoir été aménagées par les hommes et se retrouvent dans des sites d'occupation humaine de diverses époques (du paléolithique au moyen-âge). Par exemple, au Mont Sainte Odile (Bas-Rhin), tout autour du mur païen (mur de fortification de 10 km de long dont le rôle et la date de construction sont très controversés), ces pierres à bassin se retrouvent en de nombreux endroits. Cette multitude de bassins permettait vraisemblablement à ces populations (âge du bronze - âge du fer - époque gallo-romaine - moyen-âge ?) de récupérer les eaux de pluies et d'avoir ainsi une petite réserve d'eau immédiatement disponible.
Pierre à bassin (Mont Sainte Odile)
Francis Mantz, chercheur et auteur d'un livre sur le mur païen, a remarqué qu'il existait de nombreux bassins près des carrières de pierres. Voici son point de vue : " Aussi, lorsque le mur était achevé dans un secteur donné, on arrêtait l'exploitation des carrièes correspondantes, d'où la présence de quantité de rochers plus ou moins entamés à proximité immédiate du Mur païen. La présence de ces derniers est demeurée un mystère jusqu'à la fin du XIXe siècle. Certains les qualifièrent de lieux de culte druidique ou encore d'autels à sacrifices, la proximité de pierres à cupule ayant pu corroborer ces interprétations teintées de romantisme. Ce fut le mérite de R. Forrer et de ses amis A. Laugel et Ch. Spindler de replacer ces amas rocheux entaillés dans leur contexte archéologique. Après débroussaillement des alentours et après avoir débarrassé la roche affleurante de sa gangue végétale, ils ont mis en évidence de nombreuses petites carrières de pierre. " " Outre l'usage sacré que les auteurs passés ont pu prêter aux nombreuses roches à cupule, des destinations plus prosaïques ont été évoquées ici ou là ; ainsi, nos lointains ancêtres se seraient également servis de pierres à bassin dans leurs occupations domestiques : conservation de breuvages, broyage de matières alimentaires ou colorantes... Peut-être la communication par signaux entre divers points du massif ou l'éclairage de quelque passage de montagne se faisaient-ils par inflammation de substances résineuses… On n'apportera peut-être jamais d'explication rationnelle à la présence des innombrables roches à bassin dans le massif du mont Sainte-Odile. Si une grande partie résulte manifestement de l'érosion, il est incontestable qu'un certain nombre d'entre elles a été excavé par l'homme à des fins utilitaires, car la présence des déversoirs n'est pas le fruit du hasard : la proximité des carrières de pierre ne paraît pas sans importance et permet de suggérer des liens logiques entre la présence de cupules et les techniques de débitage des roches. " Le site de Montguerlhe présente les mêmes phénomènes. La présence de bassin serait donc intimement liée à l'activité des carriers. Les bassins étaient un moyen simple, à l'époque, de récupérer les eaux de pluies. En parallèle les carriers repéraient les failles naturelles des blocs (diaclases) de granite et y creusaient à intervalles réguliers des emboîtures (encoches). Ces encoches étaient destinées à la mise en place de coins en métal (fer) ou en bois. Les coins en fer frappés en cadence par les carriers, permettaient d'éclater le bloc en deux morceaux. La mise en place de coins en bois de chêne permettait, grâce à leur régulière humidification, un gonflement (sous l'effet de l'eau) exerà§ant régulièrement une force sur le bloc. L'action simultanée de plusieurs coins de bois sur un même plan de cisaillement provoquait, avec le temps (quelques heures), la fracture contrôlée du bloc. Les blocs éclatés, moins volumineux, étaient alors débités plus facilement.
Les restes d'une carrière à ciel ouvert à Montguerlhe
Le pourtour de certaines encoches montre aujourd'hui des signes d'érosion, preuve que ces encoches remontent à des temps reculés… L'utilisation des coins de bois par les carriers est très contestée aujourd'hui... En effet, beaucoup reprochent à cette technique une préparation lourde pour un résultat aléatoire et un rendement faible. Notre hypothèse est confirmée par une pierre (n°11) qui cumule les deux phénomènes : le bassin et les encoches. Le bassin permet, par un débordement canalisé, d'alimenter les coins en bois présents dans les lignes d'encoches. Cette technique d'éclatement de roche est très ancienne et était déjà utilisée en Egypte pour la construction des pyramides (la technique aux coins de bois de sycomore est très contestée actuellement par certains achéologues) et en occident au néolithique pour le faà§onnage des mégalithes (dolmen et menhir). Une publication sur les pierres à bassin et à encoches de Montguerlhe est en reflexion...
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Vue générale de la cité du Macchu Pichu |
Sur le site grandiose du Macchu Pichu, on peut voir et visiter les anciennes carrières qui ont permis la construction de la cité à la fin du Moyen Age. Sur cette photographie, on peut observer une pierre présentant un alignement d'encoches sur une ligne de faille. Les guides péruviens parlent d'un débitage de ces pierres aux coins de bois...
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